
Devenu un rendez-vous très prisé de l’art contemporain et moderne, Artgenève a ce petit quelque chose en plus, à nul autre pareil. Une énergie particulière insufflée par son talentueux directeur, Thomas Hug. Accueillie dès l’entrée par les géantes baskets très pop de l’artiste Michael Craig Martin, j’arpente les allées… d’un pied léger! Le ton est donné. Dans ce salon, un Art de grande qualité s’expose avec décontraction et convivialité, pour le plus grand bonheur des collectionneurs et des curieux.
Mais quel est donc le secret d’Artgenève?
C’est avant tout le choix d’un dialogue entre galeries (95) et institutions d’Art (30) qui rappelle que la scène artistique ne se limite pas à l’aspect mercantile, mais puise sa richesse dans le dynamisme des Musées, Fondations et écoles etc… C’est aussi sa capacité à rassembler les plus grands noms du monde entier (Gagosian, Hauser&Wirth, Massimo di Carlo, Pace, Perrotin, Continua etc..) tout en offrant une très belle représentation à la scène artistique Suisse, encore peu montrée ailleurs.
C’est enfin l’envie de se renouveler chaque année. A Artgenève il y a toujours des “surprises”. Pour cette 9ème édition, elles étaient nombreuses: un nouvel espace dédié à la vidéo d’Art en partenariat avec le Loop Barcelona, hors les murs, un pop-up gastronomique Artgenève/Nightfall au Café des bains magnifiquement mis en scène et en Design par Philippe Cramer, des installations illuminant le centre ville et une soirée dédiée à la création musicale au Victoria Hall.
Le Best of d’Artgenève 2020
Belles plantes! Les arbres pastels d’Ethel Adnan, ceux très colorés de David Hockney (galerie Lelong & Co), les fleurs de Matthew Day Jackson réunies en un immense bouquet généreux, portant paradoxalement le nom minimaliste de “Little bouquet in a clay jar” (Hauser&Wirth) ou encore cette gracieuse femme-fleur en bronze de Kiki Smith à la galleria Continua, sont autant d’hommages remarquables à notre mère Nature!
Femmes, Femmes, Femmes … Je retrouve avec un immense plaisir l’artiste Prune Nourry qui présente une très belle sculpture de corps déconstruit à la galerie Simon Studer. J’aime aussi le portrait rétro de Grégor Hildebrandt – créé sur des cassettesVHS vintage!- ou encore la sublime photographie très rock,”Avril pour Elle”, de Sarah Moon (Michael HoppenGallery) .
La Délicatesse. Chiharu Shiota n’en finit pas de nous toucher par la grâce de ses oeuvres. Templon expose un magnifique tryptique de l’artiste, créé avec ses célèbres fils rouges entremélés, ainsi qu’une sculpture de bronze très poétique. Chez Catherine Issert, une oeuvre murale de Kim Minjung, faite de papier japonais découpé, est une merveille de pureté .
Dessine-moi.… une planète, non plutôt deux planètes. Une fois de plus, la technique bluffante de Robert Longo me prend au piège : il y a a tant de perfection et de réalisme dans son dessin “Neptune et Triton” que j’ai du mal à imaginer que ce n’est pas une photo de l’espace, mais une oeuvre au fusain. Plus loin je suis totalement captivée, par un autre grand dessinateur, au registre très différent. Le Christ d’Adel Abdessemed est, comme le dise les anglais,”arresting”. Je suis subjuguée par la force et l’émotion qui s’en dégage.
Côté photographie, j’ai la tête dans les nuages devant l’oeuvre de Caroline Corbasson “Atlas”à la galerie Laurence Bernard. Passionnée par le ciel et ses formes nuageuses, l’artiste a récupéré et assemblé des anciennes photographies scientifiques tirées de “l’Atlas des nuages “de Becvar (1952). A la galerie Xippas, je tombe sous le charme des photographies de Luigi Ghirri. J’aime la lumière qui baigne “Trieste” et donne aux couleurs un éclat incomparable. Quel talent!
L’Art Moderne a bénéficié cette année d’une très belle représentation à Artgenève. Voici quelques oeuvres sublimes des grands maîtres, qui ne cessent de nous éblouir: Hantaï (Gagosian), Soulages (Applicat-Prazant), Pol Bury (Laurentin), Bernard Buffet (Bailly) et un magnifique Alexandre Perrier, un peu plus ancien, chez Simon Studer Art.
Un livre d’Artiste exceptionnel était présenté par Céline Fribourg sur le stand des éditions Take5. Créé avec l’artiste Joan Fontcuberta, il traite de la mémoire, la détérioration des images à travers le temps et la résilience. Le magnifique boitier en bois et miroir a été conçu par Jérome Blanc. Trois magnifiques textes, écrits par Zeno Bianu, Joan Fontcuberta et Céline Fribourg, ainsi que seize grands tirages (42 cm x 28 cm) photographiques réalisés par Joan Fontcuberta, illustrent le propos. Plus qu’un livre, une oeuvre d’Art à part entière!
Et le design? Je retrouve avec grand plaisir le talentueux designer Philippe Cramer qui présente sur son stand des mobiles muraux, de très beaux objets incrustés d’or et une console en marbre noir et blanc magnifique!
A l’année prochaine pour fêter les dix ans d’Artgenève !!
Caroline d’Esneval