Fine Arts Paris 2019 s’impose définitivement
Par Gilles Kraemer & Antoine Prodhomme / http://www.lecurieuxdesarts.fr
Au Carrousel du Louvre.
Dédié aux Beaux-arts, créé par les organisateurs de l’incontournable Salon du dessin, Fine Arts Paris 2019 présente 46 exposants (43 l’année passée) dont dix nouveaux marchands parisiens et internationaux. Parcours dans les allées pour des choix très cornéliens dans cette 3ème édition. Le vernissage du 12 novembre fut très connaisseur & très acheteur, faut-il le souligner.

©The Gaze of a Parisienne

Tableau représentatif de l’esprit de Fine Arts Paris. Ce que j’attends d’un salon du “connoisseur”. Du vrai connaisseur. Ici, la semelle rouge et le bronzage automnal ne s’affichent pas dans les allées du Carrousel. Dans la lignée de feu Paris Tableau qui de 2011 à 2015 fut l’incontournable rendez-vous de 24 à 26 marchands de tableaux anciens installés dans l’intimité du Palais Brongniart. Une réputation immédiate de sérieux, niveau TEFAF peintures anciennes Sa dilution dans l’immensité du Grand Palais lors de la Biennale des antiquaires de 2016 et sa tenue en 2017 à la Patinoire royale de Bruxelles (21 participants) signèrent irrémédiablement sa disparition.
Ce Vassallo est une toile faite pour la collection d’un “vrai” amoureux de la peinture. Anton Maria Vassallo s’est formé auprès des peintres flamands qui avaient fondé une colonie importante à Gênes dans la première moitié du XVIIe siècle. Le chat recroquevillé sur lui-même, épiant, est comme une signature de l’artiste. Nos trois animaux posent sans se préoccuper de l’autre; le chien regarde vers la gauche, le hérisson paraît se recroqueviller dans une position de défense. Ils insufflent du dynamisme à côté des objets inanimés dont le broc en cuivre au centre, stabilise toute la composition.

Autrefois attribué à Parmesan, ce dessin est en fait caractéristique d’Orsi. Il est probable qu’il soit en rapport avec la décoration du Casino di Sopra à Novellara, propriété du comte Camillo Gonzaga, que Lelio Orsi entreprend à partir de 1558. Le décor, complexe, mêlait allégories encadrées de cariatides et télamons (en grisaille), figures de divinités et bustes dans des niches, tympans au-dessus des portes ornés de figures en raccourci et de “cuirs”.

Le sujet est mystérieux et étonnant, en quelque sorte indéfinissable : le titre Portrait de femme est donc une solution de repli, en attente de déchiffrer l’idée qui le sous-tend.

Né à Gênes, Giovan Battista Gaulli y reçoit sa première formation avant de se rendre à Rome vers 1657 où il devient rapidement le protégé du Bernin. En 1666, la commande de la décoration de l’église Santa Agnese indique le début de son activité de fresquiste qui culminera avec la réalisation de la décoration de l’église du Gesù entre 1672 et 1677, le plus impressionnant décor baroque religieux à Rome. L’avènement d’Innocent XII en 1691 marque le déclin du grand mécénat pontifical : Gaulli se tourne alors vers les collectionneurs privés pour les commandes de décors religieux mais aussi de portraits. C’est durant cette décennie 1690-1700 que Gaulli semble avoir reçu la commande d’une grande pala d’altare représentant Le Repos durant la fuite en Egypte comme allégorie du Christ triomphant du paganisme. L’originalité de cette composition est d’associer un Repos durant la fuite en Égypte et une Allégorie du Christ triomphant du paganisme. Ce bozzetto ferait ainsi office de lien entre un dessin conservé au British Museum et la pala d’altare, perdue ou non exécutée.

Livio Agresti appartient au courant maniériste autour de Trometta et des Zuccaro. Originaire de la région émilienne, il a travaillé à Rome, au château Saint-Ange avec Perino del Vaga. Il a peint plusieurs cycles de fresques dans des églises romaines et des retables pour la Romagne et l’Ombrie. Ce modello a été daté de la décennie 1570, probablement en vue d’un tableau d’autel non retrouvé. On y reconnaît la gamme colorée maniériste de violet, rose, jaune et vert pale de ses grands formats.

Condamné à mort pour s’être rebellé contre l’empereur Claude en l’an 42, Paetus est exhorté par son épouse Arria à se suicider avec honneur, de la pointe de sa dague. Pour affermir sa détermination, cette dernière se poignarde avant de remettre sa dague à son époux. La lumière vive et oblique accuse la véhémence d’Arria, debout, dans un profil strict, tendant le poignard. A la cascade du lourd drapé orange qui l’enveloppe répond le corps avachi de Paetus vêtu des couleurs froides que sont le vert de sa tunique et le bleu de son manteau.

En 1821, Joseph-Ferdinand Lancrenon reçoit la commande d’un tableau destiné à décorer le plafond d’un des salons de l’appartement de la duchesse de Berry au pavillon de Marsan du palais du Louvre ; sujet imposé celui de Borée enlevant Orythie. Borée, le dieu du vent du nord, se voit refuser trop longtemps la main de Orythie par son père, Erechthée, roi d’Athènes. Il cède alors à une colère noire et enlève Orythie au milieu des airs. Ce tableau est l’esquisse définitive de l’œuvre, probablement destinée à être montrée au comte de Forbin, directeur des musées royaux et à l’origine de la commande.

Fedele Fischetti s’est formé à Naples, avec Giuseppe Bonito (1707-1789). Tout en exposant un style inspiré du barocchetto, il s’orienta vers une veine classicisante pour s’actualiser sur les modes picturaux alors en vogue à Rome. La composition s’inspire d’Ovide et évoque les Amours des dieux : la déesse de la lune, Séléné, s’est éprise du beau et jeune berger, Endymion. Elle demande à Zeus de plonger son bien-aimé dans un sommeil éternel afin de préserver sa beauté. Le cadrage serré, en gros plan, nous fait entrer dans l’intimité de cette scène, silencieuse et plongée dans la semi-pénombre de la nuit, douce et vaporeuse, ce qui donne à la composition un caractère onirique. Les verts, roses et blancs des drapés prennent des tons nacrés dans les valeurs claires imprimant une saveur suave à ce duo amoureux.

A voir aussi le tableau de François-Auguste Biard-1799-1882) représentant L’Hôpital des fous à Lyon, exposé au Salon de 1833, présenté par la Galerie de Bayser rappelant La leçon clinique à la Pitié Salpétrière par André Brouillet, vers 1887, exposé au Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme à l’occasion de l’exposition “Freud du regard à l’écoute”.
Fine Arts Paris franchira la Seine pour sa 4e édition en s’installant dans la cour du Dôme des Invalides, face à la place Vauban, à l’automne 2020. Ce nouvel espace permettra d’accueillir entre 65 et 70 exposants contre 46 aujourd’hui. Le Salon du dessin se tiendra du 25 au 30 mars 2020, restant heureusement au Palais Brongniart. S’il partait de ce lieu, il y perdrait totalement son âme.
Fine Arts Paris
Carrousel du Louvre / Paris
mercredi 13 – dimanche 17 novembre 2019

