Andreas Eriksson, It Takes Two
En poussant la porte bleue de l’espace Muraille, c’est un voyage fascinant et mystérieux qui m’attend. Caroline et Eric Freymond y exposent les paysages singuliers et oniriques d’Andreas Eriksson. L’artiste suédois dépeint une nature baignée de cette lumière subtile et tamisée des pays du Nord, métamorphosée par sa sensibilité, son imagination, son “paysage intérieur.” Installé depuis plus de vingt ans dans la campagne suédoise, sur la rive du lac Värnen, Eriksson s’imprègne de son environnement naturel. A travers ses créations, il restitue un dialogue poétique de ses impressions face aux paysages changeants.

“Andréas et ses oeuvres sont constamment dans cet équilibre précaire, au seuil du visible et de l’invisible, du conscient et de l’inconscient, de la figuration et de l’abstraction, du sujet et du contexte” . – Caroline Freymond
Comme nous le souffle le titre de l’exposition, It Takes Two, je suis subjuguée par l’effet ambivalent qui émane de ses tableaux. Je reconnait les feuillages verts de la végétation, la texture des rochers, les flots bleu-gris du lac, et pourtant leur construction abstraite m’emmène ailleurs, aux confins de la réalité et de l’illusion.

À l’arrivée dans l’exposition, c’est la nuit qui m’accueille! Je découvre un immense tableau, Broken Stones, figurant une nature tellurique et énigmatique dans l’obscurité nocturne. Cette oeuvre a été conçue spécialement pour l’exposition, tout comme les taupinières en bronze, véritables portes vers un univers sous-terrain invisible, creusé de galeries par les taupes aveugles. Eriksson est fasciné par la terre, elle illustre pour lui une frontière entre ce que nous percevons de la nature et l’insondable mystère de ce qui nous échappe.

À l’étage en-dessous, le magnifique tableau Semaphore Schieffergrau captive par ses nuances douces et sa composition si gracieuse. Il dialogue avec une tapisserie aux tonalités ténues, Södra Ström III .

L’exposition s’achève brillamment avec une dernière salle dédiée à un des chefs-d’oeuvre de l’artiste, Texture Mapping (2014-2019). Une composition de 45 peintures dont l’ensemble crée un magnifique paysage abstrait, infiniment poétique que l’on découvre pas à pas. Dans cette même pièce, est présentée A Second Time. (2003-2007), une sculpture historique d’Eriksson, exposée à la Biennale de Sao Paulo en 2012 et au Musée d’Art Moderne de Vienne en 2008. Ces arbres en bronze proviennent, en réalité, d’une seule branche que l’artiste a séparé en deux parties pour créer deux arborescences, reproduisant ainsi le processus de clonage du monde vivant.

Ce qui me touche particulièrement chez Eriksson, c’est son talent de coloriste. Il y a quelque chose de magique dans la douceur et l’harmonie singulière de ses ensembles de “patchworks” colorés, offrant l’expérience d’une nature poétisée. Merci à Caroline et Eric Freymond ainsi qu’à Laurence Dreyfus, commissaire de l’exposition, de nous offrir ce moment suspendu hors du temps, entre réalité et imaginaire.

Caroline d’Esneval
ANDREAS ERIKSSON , It Takes Two. Jusqu’au 15 Avril 2023.
Espace Muraille , Pl. des Casemates 5, 1204 Genève


2 commentaires
Claire Vandermensbrugghe
Merci Caroline de m’avoir fait découvrir ce bel artiste.
Calvet
Belle découverte ! Merci Caroline !