The Invisible Dog art center, Brooklyn NY
Vous ne pourrez plus aller à NY sans y passer….

Loin des sentiers battus, niché au milieu d’un quartier de Brooklyn bourré de charme, cet espace dédié à l’art est aussi insolite que fascinant. Tout y est inspirant, son histoire, le bâtiment lui-même, la beauté des studios, le talent des artistes locataires… jusqu’à ce nom qui aiguise la curiosité, The Invisible Dog ! Ce centre d’art est avant tout l’aventure d’un homme, le talentueux Lucien Zayan, fondateur et directeur du lieu. C’est lui-même qui m’accompagne pour en faire la visite.

Le projet d’une vie, celui de Lucien Zayan
La naissance de cette aventure pourrait être un sujet d’un roman.
Lucien Zayan, homme d’opéra et de théâtre, est passionné depuis sa plus tendre enfance par la magie du monde du “Spectacle”. À 20 ans, il entre à l’Institut français d’Alexandrie en Egypte, puis rejoint de belles institutions françaises, à Paris celle de l’Odéon-Théâtre de l’Europe et le Théâtre de la Madeleine, mais aussi le Théâtre de la Criée à Marseille et le Festival d’Art Lyrique d’Aix- en -Provence, aux côtés de Stéphane Lissner. Les expériences enrichissantes s’enchainent avec succès … jusqu’au moment où, ce qu’il croyait être une nouvelle opportunité, se révèle “un échec sur toute la ligne“.

Zayan décide alors de s’exiler pendant trois mois à New-York pour réfléchir à son futur. Pourquoi cette ville? “Parce que c’est un lieu où je ne connaissais personne et qui m’attirait depuis toujours.” L’arrivée est rude. Nous sommes en Octobre 2008, il y est accueilli par la neige, un froid piquant et bien sur une crise économique sans précédent. L’homme décide de tenir bon pendant les trois mois qu’il s’est fixé. La chance lui sourit enfin. En Décembre, alors qu’il se promène sur Bergen à Brooklyn, il tombe en arrêt devant un magnifique bâtiment industriel du milieu du XIXe siècle, tout en briques rouges et bois. Lucien a un coup de foudre immédiat. Ce lieu lui inspire l’idée de créer un centre d’art multidisciplinaire pour y montrer les oeuvres d’artistes de tous horizons et créer des événements. Le destin lui est décidément favorable, le bâtiment n’est plus en activité depuis 10 ans et le propriétaire accepte de le louer à Zayan.

The Invisible Dog , un héritage hors du commun
Mais d’où vient ce nom énigmatique? L’histoire un peu folle est d’autant plus géniale qu’elle est réelle. À l’origine, le bâtiment abritait une manufacture de ceintures, textiles et bijoux fantaisie. En 1970, le propriétaire invente un nouveau jouet étonnant : une laisse rigide avec un harnais en cuir, censée promener un chien invisible et baptisée “The Invisible Dog”. Cet objet loufoque connait un succès prodigieux. Il est distribué dans les plus grandes chaines de magasins aux États-Unis, toutes sortes de publics – des plus jeunes aux plus branchés – se l’arrachent, il entre ainsi dans des millions de foyers américains. Cet objet vedette fait partie de la culture américaine et de l’histoire du lieu. Pour Lucien Zayan, c’est une évidence, son projet portera ce nom. D’ailleurs avant même que le centre n’ouvre ses portes, le New York Times lui-même en fait l’annonce avec un titre très séduisant, “The Invisible Dog barks again” (Le chien invisible aboie à nouveau).

Lucien Zayan a réalisé son rêve. Ouvert en 2009, son fabuleux centre d’art abrite aujourd’hui 27 ateliers d’artistes, un espace de co-working avec 30 postes de travail pour des locations éphémères, un immense lieu d’exposition qui propose annuellement une quinzaine de présentations artistiques, mais aussi des spectacles et des évènements culturels. Surtout, il réunit des artistes talentueux aux champs d’expression variés, plasticiens, écrivains, designers, artistes joailliers, photographes, sculpteurs etc… que Lucien accompagne, conseille, réconforte avec bienveillance.
Trois étages dédiés à l’art sous toutes ses formes et aux artistes
Notre visite commence par une cour au charme bucolique, où l’art interagit avec la nature et l’édifice. Je retrouve la sublime sculpture féminine de Prune Nourry, émergeant gracieusement du mur au milieu de tiges grimpantes. L’artiste française a rejoint The Invisible Dog au tout début du centre d’art et … ne l’a plus jamais quitté! Au milieu, une immense construction en pyramide inversée se plante dans le sol, l’intérieur est tapissé de terre, mousse et végétaux. C’est le Tea Room du jardin, créé par l’artiste japonais Takao Shiraishi. Plus loin, l’herbier de Margot Guralnick, collé sur le mur, imprègne peu à peu le ciment, l’artiste a réalisé aussi un portrait végétal de Lucien Zayan!
Tout le rez-de-chaussée est une immense pièce qui sert de lieu d’expositions et d’événements culturels de toutes sortes. Accroché au plafond, un lustre monumental a été conçu par les artistes Steven & William Ladd en recyclant 10 000 boucles de ceintures de l’ancienne manufacture. De surprise en surprise, je me retrouve dans un monte-charge ouvert, typique de ces immeubles industriels américains. De là on peut admirer les murs de la cage d’ascenseur investie par Giuseppe Stampone, avec un thème très mystique: l’Enfer (le rez-de-chaussée)/ le Purgatoire (le 1er étage) et le Paradis(le 2ème étage).

Cinq stops pour découvrir cinq studios d’artistes … c’est parti!
Premier étage, le Purgatoire. Je rencontre Stephen Morisson, dans son studio. Le jeune artiste est obsédé par les chiens, il les sculpte, les peint, les introduit dans tous les éléments de la vie quotidienne ou dans les tableaux des grands maitres. Avec humour et talent, il crée un nouveau monde peuplé par ses amis canins, où l’on voit poindre leurs museaux même sur les gâteaux au chocolat! Il a réalisé cette année, chez The Invisible Dog une installation monumentale sous forme d’un joyeux banquet très festif et décalé de… chiens! L’univers d’Anne Mourier, lui, est consacré à la féminité que l’artiste représente avec une grâce subtile. Elle vient de réaliser une série de photos de sculptures de femmes, en focalisant sur une partie précise. Anne Mourier en reprend un détail dans une création en verre. Oliver Jeffers est à la fois peintre, dessinateur et créateur de livres d’images pour enfants connus dans le monde entier. Son univers est peuplé de rêves, d’humour et d’une poésie irrésistible. Au Paradis (2nd étage), je découvre le studio new-yorkais de Prune Nourry, dont elle-même, m’a si souvent parlé. Je retrouve les traces de ses recherches et de ses créations que j’aime tant. Ici, la sculpture d’une de ses Terracotta Daughters, et sur les murs les photos de chacun de ses projets…moment très touchant pour moi ! Enfin, je rencontre Camille de Galbert, artiste plasticienne et vidéaste. Elle me raconte sa vie de danseuse, sa blessure au genou, son évolution vers le dessin, la video, ses oeuvres sculptées de cire et silicone. Dans son travail Camille de Galbert procède par couches qui se superposent, de l’intérieur vers l’extérieur et vice-versa, elle s’intéresse particulièrement à la peau- cette frontière séparant notre corps de ce qui l’entoure-, ainsi qu’aux matériaux évoluant d’un état à un autre, comme la cire liquide qui se solidifie en refroidissant.
Si vous passez à New York, allez à Brooklyn découvrir The Invisible Dog. Vous serez, comme moi, captivés par ce lieu enchanteur, où une créativité sans cesse en mouvement a élu domicile … pour longtemps!
Caroline d’Esneval
The Invisible Dog , 51 Bergen Street , Brooklyn
Ouverture au public : du jeudi au samedi de 13h à 19h / dimanche de 13h à17h/ autres jours sur rendez -vous. Entrée gratuite.
+ d’informations: The Invisible Dog


2 commentaires
Flahault Launiau
Hâte d’y aller! Merci pour ce partage.
Calvet
Génial !!! Merci pour cette belle découverte !