Santiago Mostyn, 08-18 (Past Perfect),
PAR THIERRY GRILLET

Il faut aller voir l’installation de l artiste américain Santiago Mostyn à la galerie Andréhn-Schiptjenko. Cet artiste qui travaille en croisant les différents ancrages – Afrique du Sud Trinidad Tobago, Zimbabwé, Suède où il vit – s’est emparé de l espace de la rue Sainte Anastase pour conduire une méditation immersive.
Ici le lieu est l’œuvre. Contenu autant que contenant. On entre non plus dans une galerie qui accueillerait sur ses cimaises, des réalisations, mais dans une œuvre d’un artiste qui réfléchit et met en scène toutes les incarnations de la lumière. Les murs sont recouverts ainsi de vaste lais de papiers peints cyanoypes qui, comme le papier photographique, sont « impressionnés » au fil du temps par la lumière. De vert à l’origine, le cyanotype a pris une belle teinte bleue sur laquelle l’artiste a disposé, dans une élégante ligne graphique, des diptyques, triptyques, ou uniques. Cette disposition en ligne, qui appelle le récit, évoque des lieux, des histoires.

Collectés à travers des clichés de presse ou d archives. Personnelles comme cette école au Zimbabwe que l’artiste à fréquentée et où il est revenu pour saisir, à la manière d’un photographe documentaire, une classe de jeunes apprentis africains mécaniciens. Ces corps, ces sourires, laissent passer peut-être – pour l’artiste sensible aux histoires multi séculaires des corps – quelque chose du passé ? Santiago montre. Sans insister. Il préfère enregistrer comme le cyanotype, les évolutions parfois imperceptibles qui marquent les visages et déterminent les postures. Comme celle de cet élégant passant à Tobago, d’une élégance quelque peu surannée.
Est-ce pour donner à l’histoire des hommes, à la sienne comme à celle de ces autres qu’il croise, une profondeur géologique, mais parfois l’accrochage fait alterner le fil du récit à hauteur d’homme avec des vues de paysages, de pierres et de matière. Donnant soudain un recul poétique à l’ensemble. Maître du rythme des narrations, Santiago Mostyn fracture le récit par un tirage d’arbre en couleur, aux rameaux alourdis par une plante parasite – grand format qui rompt avec la relative intimité des autres images. Image de l’enchevêtrement qui est le moteur de nos histoires, faites de beauté parfois parasite par laquelle nous vivons et nous brillons à la lumière ?
INFORMATIONS :
Santiago Mostyn, 08-18 (Past Perfect),
jusqu’au 22 mai
Galerie Andréhn-Schiptjenko
10, rue Sainte-Anastase
75003 Paris
France
T +33 (0)1 81 69 45 67

