Festival de belles images à Deauville

Planches Contact, 2022

Planches Contact, 13e édition, c’est parti depuis quelques jours déjà et jusqu’au 1er janvier, ce festival de photographie de Deauville a commencé, ce sera l’occasion de se promener dans la ville, sur les célèbres planches bien-sûr, aux Franciscaines… afin de découvrir la sélection 2022.

C’est devenu un rendez-vous de la photo très attendu orchestré par Laura Serani, la directrice artistique. De nombreuses propositions d’expositions s’offrent aux visiteurs. C’est la possibilité de voir un panorama de la photographie contemporaine avec les images des « Grands », Bettina Rheims, Raymond Depardon, Georges Rousse et Jessica Lange, des jeunes talents à découvrir et de nombreux artistes invités.

La Chapelle de Bettina Rheims

Bettina RHEIMS
Bettina RHEIMS à l’intérieur de son installation La Chapelle avec la collaborationde Marie-Noëlle Perriau. Lieu d’exposition : Le Point de Vue, Deauville.

Bettina Rheims dévoile sa Chapelle, une installation immersive développée pour la première fois en 2018 à Hyères. Il s’ agit d’images de magazines déchirées présentées comme un papier peint couvrant la totalité de l’intérieur de cette caisse de transport géante en pin, fragile. On y entre, on foule des pieds le sol sur lequel Madonna est représentée.

« Je réfléchissais beaucoup à ce qu’il fallait faire de ces images qui allaient disparaitre le mois d’après ou trois mois après, un magazine ça se garde, ça se jette et l’idée des photos kleenex ne me plaisait pas tellement. Grâce à la complicité des gens de la Maison Européenne de la Photographie, Jean-Luc Monterosso en particulier (un des fondateurs de la MEP), j’ai fait une exposition avec des images faites que pour la publicité ou des magazines. J’ai cassé cette paroi de verre et petit à petit ces images sont devenues des icônes car très publiées, ce sont des femmes célèbres, les gens les connaissent, les cherchent dans les expositions. Au moment où j’ai fait cette première installation avec Marie-Noëlle Perriau on s’est dit comment faire pour ne pas mettre des images sur les murs. J’ai eu cette idée de lacération, de déchirement, parce que j’aime la peinture, j’aime Villéglé et Rotella et les affichistes, et je me suis dit qu’on allait donner une autre vie à ces images sous une autre forme. Voilà comment est née l’idée de la Chapelle. « 

Bettina Rheims

Il faut tromper l’Atlantique pour pouvoir l’aimer

Raymond DEPARDON – Le littoral français. Lieu d’exposition : La Plage

Raymond Depardon nous offre les couleurs de l’Atlantique, une merveille selon lui avec les films Kodak. Il aime lui l’homme de la terre et du Sud cette lumière douce, presqu’ennuyeuse qu’il faut quitter pour l’apprécier. Il nous montre la grande diversité du littoral français. Il a utilisé le format américain et aime la fidélité du film Kodak 400 ASA. Il pense qu’en France nous manquons de photographies de plage avec des gens et évoque la complexité du droit à l’image qui, s’ill est trop exigeant, empêche la production de photographies.

La plage a quelque chose de très moderne

« Les ciels français très lumineux ont commencé à m’apparaître sur la photo couleur d’une manière totalement différente que des photos en noir et blanc. J’ai commencé à y prendre goût et 2e chose, nous sommes à Deauville et le film a été fabriqué en face à Rochester [Etat de New York, note de l’autrice] la ville de Kodak et Rochester c’est à peu près la même hauteur qu’ici, un peu le même type de lumière et donc, les chercheurs de Kodak ont fait un film pour Deauville, pour la France, pour le littoral. Ils n’ont pas fait un film pour les Alpes du Sud ou pour la Corrèze et dès qu’on charge un film Kodak ici c’est une merveille ! Cela a été une découverte pour moi. « 

Raymond Depardon

Résidences multiples

De nombreuses résidences avec toujours des invités prestigieux comme Omar Victor Diop, Jean-Christophe Béchet, Carole Bénitah, tous ont résidé à Deauville dans cette maison mise à leur disposition par la ville et ont pu ainsi s’imprégner des lieux et produire des oeuvres.

Utiliser la ville comme un énorme studio à ciel ouvert

Omar Victor DIOP.
Omar Victor DIOP. Deauville résonne avec le Sénégal de son enfance. Odysseia. Lieux d’exposition : Le Petit Bain ; le square François André et les Franciscaines, Deauville.

L’artiste sénégalais, Omar Victor Diop, autodidacte, travaillait jusqu’à ses 30 ans dans la finance et la communication d’entreprise, il n’était pas heureux et la photo lui a offert une nouvelle vie. Il imagine un dialogue avec son pays natal, oscillant entre le passé et le présent, l’artiste se met en scène dans ses images. parfois de jolies coïncidences comme une rencontre avec un autre Sénégalais. Ces déambulations dans Deauville feront l’objet d’une publication aux éditions Louis Vuitton.

« Utiliser la ville comme un énorme studio à ciel ouvert dans lequel je mets en scène une mythologie personnelle qui se joue entre Dakar et Deauville sur la question du voyage, sur le fait que nous ne soyons jamais vraiment partis car dans notre coeur et dans notre tête on emporte les gens que nous aimons et, dans ces images il y a toujours un moment où je suis saisi par un souvenir ou une apparition dans un coin de Deauville qui évoque pour moi un moment dakarois comme ce promeneur en boubou que j’ai croisé sur la plage. « 

Omar Victor Diop

Georges Rousse au Point de Vue

Georges Rousse s’empare carrément de l’ancien Yacht Club de Deauville, qu’il repeint en rouge et jaune et, coïncidence, le résultat qui est l’image photographique prise de l’installation selon l’angle décidé par l’artiste, son « point de vue » est exposée au Point de Vue à Deauville dans son exposition qui lui est consacrée Pérégrinations. Cette installation permet de comprendre le processus utilisé, il faut savoir qu’il n’y a jamais de trucages. Georges Rousse prépare longuement ses interventions, repérage des lieux, dessins préparatoires qui sont d’ailleurs très beaux. J’entendais Raymond Depardon, qui les regardait, dire qu’il les aimait beaucoup ! Puis il y a l’intervention sur le bâtiment et enfin la prise de la photographie.

Georges RousseGeorges ROUSSE
George ROUSSE s’est emparé de l’ancien Yacht Club de Deauville pour Planches Contact, le résultat est à voir dans l’exposition qui lui est consacrée au Point de Vue, Deauville. Courtesy Galerie RX.

Six jeunes talents en résidence sous l’égide de Sarah Moon

Lise GUILLON
Emile GARÇON & Lise GUILLON. D’amour et Deauville. Court-métrage, 20mn. Lieu d’exposition : Les Franciscaines

Sarah Moon est depuis 2019 la présidente du jury du Prix Tremplin Jeunes Talents. Six jeunes photographes sont invités en résidence, ils ont reçu chacun une bourse de 4 000 euros pour produire une oeuvre. Deux possibilités de remporter le prix, la première par le jury et la seconde par le public, en effet tous les visiteurs sont sollicités à faire leur choix ici. Cette année le jury a récompensé il y a quelques jours Dana Cobjuc qui a reçu 1 500€ qu’elle s’est empressée de partager avec les cinq autres sélectionnés. Dana Cobjuc est diplômée des Beaux-Arts de Bucarest, ses photographies prises à Deauville sont troublantes, elle a réussi à mêler son pays natal la Roumanie et la ville normande. Les silhouettes semblent porter des costumes traditionnels, on imagine la campagne roumaine, les champs de blé..les ciels, la mer en noir et blanc s’estompent, se laissant regarder et rappelant quelques souvenirs, beaucoup de poésie, de délicatesse émanent de ces images.

Emile Garçon et Lise Guillon ont réalisé un court-métrage en noir et blanc à travers les lieux très clichés de Deauville, très chabadabada, un homme et une femme qui se croisent…

Dana COBJUc
Dana COBJUC, lauréate du prix du jury Tremplin Jeunes talents avec Laura Serani la directrice artistique de Planches Contact devant les oeuvres de la photographe, Deauville, laboratoire d’exploration artistique. Ouvrir le rivage. Lieu d’exposition : Les Franciscaines, Deauville.

photo4food : 1photo = 1 repas

photo4food
Stanislas AUGRIS, là où l’industrie portuaire mord sur la nature. La morsure. Résidence avec la fondation photo4food. Lieu d’exposition : La Plage

Plusieurs résidences sont initiées lors de ce festival, il y a celle de la fondation Photo4food abritée par l’Institut de France, créée par Virginie et Olivier Goy qui promeut le travail de jeunes photographes et, par la vente de clichés, fournit des repas aux plus démunis. Cinq photographes ont été choisis par un jury présidé par Laura Serani. Sur la plage et dans d’autres lieux comme Le Grand Bain on peut voir leurs réalisations. La fondation a organisé une vente aux enchères qui a eu lieu aux Franciscaines le 30 octobre, de nombreux photographes ont offert des tirages qui ont été vendus au profit d’une association locale.

Anne-Laure MAISONAnne-Laure MAISON & Michel CAM,
Anne-Laure MAISON & Michel CAM, supplément d’âme deauvillais. Human Soul à Deauville. Résidence avec la fondation photo4food. Lieu d’exposition : La Plage

Deauville est une ville de cinéma

Jean-Christophe BECHET
Jean-Christophe BECHET. Deauville fait son cinéma dans l’oeil de Jean-Christophe Bechet, une fiction du réel. Lieu d’exposition : Les Franciscaines

Jean-Christophe Bechet se promène à travers la France et réalise des portraits de ces petites villes parfois aux caractères complètement opposés. Il y a eu Corbeil Essonnes, où il a été en résidence dans le cadre du festival L’Oeil urbain (2018), puis aujourd’hui Deauville, deux lieux très différents mais lui ce qui l’intéresse ce n’est pas de montrer l’évidence mais les dessous qu’il aime comme à Deauville entre palaces et Casino, il y a la lumière, ses habitants, la vie de tous les jours. Des séries de photos imaginées comme des scénari qui décrivent l’identité de la ville. Le photographe déambule dans les rues, essayant de décrypter le profil du sujet, ici Deauville. En résidence sur place, il est venu à plusieurs reprises passer quelques jours. Les photographies réalisées sont en argentique.

Deauville, une ville de cinéma.

« Mais derrière cette apparence de vide, des hommes et des femmes s’affairent, comme en coulisses. Les coulisses, le cinéma, les Planches, je commençais à tenir mon scénario. J’ai vu alors Deauville comme un théâtre, sa plage et sa promenade en sont une scène somptueuse éclairée par les sunlights; et, en arrière-plan, dans l’ombre, la ville, grande machinerie «backstage» où vivent et travaillent les organisateurs et les techniciens de ce grand spectacle qui s’éclaire par à-coups quand le climat change, et quand les visiteurs débarquent… »

Jean-Christophe Bechet

Dernière chose à regarder attentivement toutes ces photos d’anonymes exposés à la gare sur les portes des cabines des Planches, Anonymous Project.

Tous les jours c’est un évènement différent, des projections, des rencontres, débats nouvelles technologies , des NFT.

Depuis sa création Planches Contact a permis sans vraiment le vouloir au départ la création d’une collection importante pour la ville.

Un festival que vous aimerez j’en suis sûre, courrez-y !

Florence Briat Soulié

Jean-ChristianBOUCART
Jean-ChristianBOUCART, regard vagabond sur la Normandie. Blow up Normandie ; fragments d’une chronologie du hasard. Lieu d’exposition : Embarcadère, Deauville.
Filigranes Editions

INFORMATIONS :

PLANCHES CONTACT

Festival de photographie de Deauville

avec les Franciscaines de Deauville

Jusqu’au 1er janvier

Directrice artistique : Laura Serani

Artiste plasticien scénographe : Jean-Charles Remicourt-Marie

Planches Contact

Photo : Catalogue Planches Contact 13e édition / Filigranes Editions

Vue de Deauville avec le plongeoir
Vue de Deauville avec le plongeoir

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