Coups de coeur à Paris Photo 2023
Oui, Paris Photo est bien ” the best Photo fair in the world, a must for photo collectors ! », comme l’affirme un collectionneur étranger, enthousiasmé par la grande qualité de la foire et des oeuvres. En effet, les 190 exposants, venus des cinq continents, présentent le meilleur de la scène photographique d’hier et d’aujourd’hui, dans toute sa diversité, sa riche créativité, sa beauté. Regards croisés avec Florence , en quelques clicks !

Comme des tableaux flamands. Premier stop, à la galerie zurichoise Bildhalle. Je suis subjuguée par les images intimistes de paysages, d’intérieurs ou de détails délicats, présentées par la photographe Ilona Langbroek (née en 1970, NL) . De ses clichés en clair obscur se dégage une certaine nostalgie d’un temps passé , trace de l’histoire de sa famille qui a dû quitter les Indes orientales néerlandaises lors de son indépendance. Sublime!

Collection imaginaire . Dans cette même galerie, coup de coeur unanime, pour cette vitrine d’objets énigmatiques, paraissant tout aussi réels que mystérieux. L’artiste Casper Faassen (Né en 1975, NL) a repris les vases, pots et potiches apparaissant dans les tableaux des grands maîtres, tels Matisse ou van Gogh. Il a posé ses images sur des fonds convexes pour donner l’illusion optique de l’objet lui-même, avant de fermer les niches de présentation par des calques translucides. L’effet est bluffant.

Femme ou mannequin de vitrine ? Une magnifique tête de femme, présentée par Valérie Belin , illustre l’immense talent de cette artiste. L’éclat et le grain de la peau ainsi que le travail de lumière qui confère aux yeux un regard captivant, donnent vie à ce mannequin de plastique… à s’y méprendre! (Chez Nathalie Obadia). Actuellement, plusieurs photographies de Valérie Belin (née en 1964) sont présentées à la BNF (Bibliothèque Nationale de France) , dans le cadre de l’exceptionnelle exposition Noir & Blanc, une esthétique de la photographie, jusqu’au 21 janvier 2024.

Femme savante . Cette femme de profil au regard volontaire, à la coiffure et à la robe d’un temps révolu , se reconnait -elle dans cet oiseau aveuglé à côté d’elle, qu’elle semble regarder avec agacement ? Les photos de la série d’Agnès Geoffray sont superbes et le propos habilement suggéré (galerie Maubert).

“Un monde parfait avec une fissure “, disait Erwin Olaf (1959, Sept 2023) à propos de son travail. À travers ses photos très léchées, mettant en scène des personnages élégants, bien coiffés, dans des lieux correspondants aux clichés de la réussite sociale, il y a toujours un grincement. Le malaise apparait dans un détail. L’expression désespérée du jeune homme , la jolie femme qui fixe le sol, la jeune étudiante débraillée avec son regard vide, le vieux professeur qui baisse les yeux. Rien n’est clair, explicite, mais une tension palpable envahit ces images et les rend énigmatiques, saisissantes.

Inspiration Mode! Aux côtés de Sarah Moon, Paolo Roversi capture, à son tour, la danse ronde d’une élégante robe verte. On pourrait entendre la voix d’Alain Souchon rappeler que “la seule chose qui tourne sur terre, c’est leurs robes légères” ! Un instant magique de féminité et d’élégance joyeuse (Galerie Camera Obscura).

Voyage, voyage! Le célèbre photographe Steve McCurry (né en 1950, à Philadelphie, USA) nous emmène dans des contrées éloignées avec ses clichés magiques. Maniant magistralement la couleur, les ombres et les contrastes , il m’enchante ici avec cette photo de l’Inde, qui semble venir d’un passé très lointain .

Angel Albarrán (né en 1969 à Barcelone) et Anna Cabrera (née en 1969 à Séville) travaillent ensemble depuis 1996. Leur sujet de prédilection est la nature. A la manière de la Renaissance, les deux artistes deviennent alchimistes et subliment ainsi la beauté du monde en travaillant avec un papier japonais très fin recouvert d’une feuille d’or. En ce moment à Barcelone on peut voir à la Fundació Foto Colectania L’Indestructible, une exposition consacrée à ce couple d’artistes, jusqu’au 7 janvier 2024.
Galerie Esther Woerdehoff

David De Beyter nous impressionne par ses polyptyques de grand format, où le ciel de paysages lunaires ou extra-terrestres des îles Canaries est traversé de rayons de lumière. En se rapprochant, on s’interroge sur la nature de l’artefact : une photographie surajoutée ? une déchirure sur le tirage ? Non, il s’agit d’une coupure, nette, précise, sur le négatif lui-même. Le travail de l’artiste déconstruit ainsi les rites et les croyances de la communauté des skeptics, qui appréhendent les accidents photographiques comme autant de preuves de l’existence des Aliens et des OVNI.

Raisan Hammeed (né en 1991) a été invité par Paris Photo ainsi que trois jeunes photographes. Après des études aux Beaux Arts de Mossoul qu’il a dû fuir en 2014, il reprend ses études en 2016 à l’Académie des Beaux-Arts de Leipzig, où il a obtenu son diplôme en 2022. Ses photographies sont inspirées de son histoire familiale et de son pays. Ses déchirures, les morceaux d’une vieille photographie qu’il tente de recomposer à travers un détail, le plan de sa ville et le rêve de la retrouver, autant de souvenirs détruits par la main de l’homme qui l’a conduit à cet exil. Raisan Hammeed a donné ce titre Zer-Störung (destruction) à son projet qui comprend des photographies prises à Mossoul avant sont départ et celles du présent qui sont un travail sur la mémoire de sa ville natale.


Raisan Hameed Zer-Störung – Reminders from Iraq, 2021 -Fine Art print. 32,0 x 48,3 cm
Florence Briat-Soulié et Caroline d’Esneval


Un commentaire
christinenovalarue
🤍🖤